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La diplomatie du Ramadan... Le soft power du Maroc

Rabat organise des visites d'imams et d’érudits dans d'autres pays pendant le Ramadan, pour prendre part aux activités de la communauté marocaine et des musulmans de ces pays durant le mois saint

11:29 - 27/03/2023 lundi
MAJ: 12:49 - 27/03/2023 lundi
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Le roi marocain Mohammed VI, accompagné du prince héritier Moulay el-Hassan, lançant l'opération nationale "Ramadan 1444", initiée par la Fondation Mohammed V pour la solidarité à l'occasion du mois sacré de jeûne musulman du Ramadan, à Sale.
Crédit Photo: Palais royal marocain / AFP
Le roi marocain Mohammed VI, accompagné du prince héritier Moulay el-Hassan, lançant l'opération nationale "Ramadan 1444", initiée par la Fondation Mohammed V pour la solidarité à l'occasion du mois sacré de jeûne musulman du Ramadan, à Sale. Crédit Photo: Palais royal marocain / AFP

Depuis plus de trois décennies, le Maroc s'emploie à promouvoir la "diplomatie du Ramadan" en tant que "soft power" contribuant à améliorer et à renforcer ses relations avec les pays européens, ainsi qu’à soutenir sa communauté à l'étranger, qui compte plus de 5 millions de personnes, selon les statistiques officielles.


Pendant le mois de Ramadan, Rabat organise des "Leçons Hassaniennes" avec la participation d'érudits du monde entier et en présence du roi Mohammed VI, tandis que des Zaouïas soufies accueillent leurs fidèles originaires de plusieurs pays.


À la mi-mars, le Maroc a annoncé qu'il avait envoyé 144 imams et érudits dans 9 pays étrangers, pour prendre part aux activités de la communauté marocaine et des musulmans de ces pays durant le mois de Ramadan, peut-on lire dans un communiqué de la Fondation Hassan II pour les Marocains Résidant à l'Étranger.


Cette Fondation organise et encadre ces visites de guides religieux marocains, dans le cadre du "Programme de sensibilisation religieuse", qui a débuté en 1992.


Soft power


La Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l'étranger a déclaré dans son communiqué :
"La mission comprend 144 prédicateurs et psalmodieurs-récitateurs pour participer aux activités des membres de la communauté
(marocaine)
tout au long du mois de Ramadan".

Le communiqué précise que
"la mission comprend des psalmodieurs-récitateurs affectés aux prières des Tarawih, ainsi que des imams-prédicateurs, qui partageront l'ambiance du Ramadan avec les membres de la communauté, en Allemagne, en Belgique, en Espagne, aux Pays-Bas, en Suède, en Suisse, en Norvège, au Canada et aux États-Unis".

Pour sa part, Abdelhakim Abu El-Luz, chercheur marocain spécialisé dans les affaires religieuses, a déclaré qu'il est possible de
"considérer les initiatives officielles du Maroc pendant le mois de Ramadan, telles que les visites d’imams et de prédicateurs, comme un instrument de soft power".

Abu El-Luz a ajouté, lors d'un entretien avec la presse, que
"le Maroc affirme que le but de ces activités est d'encadrer
(former)
la communauté, même si de nombreux pays européens ont commencé à former eux-mêmes des imams sur leur sol".

Et d’expliquer que dans ce domaine, le Maroc
"est en concurrence avec l'Arabie Saoudite d'une part, et l'Egypte à travers Al-Azhar de l'autre"
. S'agissant des concours d'enseignement du Coran, Abou El-Luz a déclaré :
"Ils sont organisés dans le cadre d'initiatives privées ou d'associations non gouvernementales, de sorte que l'évaluation de l'efficacité de la politique marocaine dans ce domaine nécessite des recherches approfondies et une bonne connaissance de la nature de cette politique."

Les Leçons Hassaniennes


Le deuxième instrument de la diplomatie du Ramadan apparaît dans la volonté du Maroc d'organiser, depuis plus d'un demi-siècle, des rencontres connues sous le nom de "Leçons Hassaniennes", en accueillant des savants et des érudits du monde entier, pour traiter de questions liées à la religion et aux préoccupations de la Ummah (nation).


Les "Leçons Hassaniennes", causeries qui portent le nom du défunt roi Hassan II, représentent, selon le penseur marocain, une "Sunnah" (tradition) marocaine qui offre une opportunité de communication avec les érudits de la Ummah (nation), et une occasion pour la classe dirigeante de se former sur le plan religieux.


Le défunt roi Hassan II a initié ces rencontres en 1963, et le roi Mohammed VI en a assuré la pérennité. Elles se tiennent au palais royal de la capitale, Rabat, mais aussi parfois dans d'autres villes.


Les "Leçons Hassaniennes" se distinguent également par le fait qu'elles ont ouvert leurs portes à des savants de haut niveau, de différentes sectes et orientations intellectuelles, qu'ils soient sunnites ou chiites, ainsi qu'à des cheikhs soufis.


Ainsi, des savants et des cheikhs tels que Abul Ala Maududi (Inde), Mohamed Metwali Chaârawi et Youssef al-Qardaoui (Égypte), Mohamed Saïd Ramadhan al Bouti (Syrie), Ahmed Raïssouni (Maroc) et le leader chiite Moussa Al-Sadr (Liban) ont été invités à donner des causeries religieuses du haut de cette tribune.


Cette causerie, qui se déroule en présence du roi Mohammed VI, consiste en une leçon de 50 à 60 minutes, donnée par l'un des érudits, un évènement retransmis en direct à la radio et à la télévision.


Concours internationaux


Les célèbres psalmodieurs marocains contribuent également à la diplomatie du Ramadan, que ce soit à l'intérieur du pays comme Omar Al Kazabri, imam de la mosquée Hassan II de Casablanca (la plus grande du pays), ou Laayoun EL Kouchi, imam de la mosquée Al-Andalus de Casablanca.


Ou encore des récitateurs qui remportent des concours internationaux, comme Younes Mustapha Gharbi, lauréat en avril 2022 du concours "Parfum de la parole" pour la récitation du Saint Coran, organisé par l'Arabie Saoudite, avec la participation de 40 000 participants venus de 80 pays.


Trois Marocains (Abdelbaset Wrach, Mounjid Hamza et Ilyas Kroum) ont remporté le concours de la plus belle récitation du Saint Coran, dans le cadre des prix de
"Déclamation du Saint Coran et ses sciences 2022"
,
organisé aux Émirats Arabes et ont été classés premiers dans la catégorie "toutes nationalités-hommes", parmi des milliers de participants venus de 79 pays.

Les Zaouïas soufies


Les confréries soufies constituent un autre vecteur de la diplomatie du Ramadan au Maroc. Les Zaouïas s'emploient à organiser divers événements, tels que la tenue de conférences, ainsi que des séances de dhikr, qui attirent des adeptes de différentes confréries, de l'intérieur comme de l'extérieur du Maroc.


Les événements les plus importants sont organisés par la Tariqa Qadiriya Boutchichiya (la plus grande confrérie soufie du pays) et la Tariqa Tijaniyya, qui se caractérise par la présence d'un grand nombre de fidèles originaires de plusieurs pays.


Aujourd'hui encore, la Zaouïa Tijaniyya au Maroc maintient ses liens historiques avec les pays d'Afrique, en plus du rôle historique joué par "Fès" en tant que capitale religieuse et du savoir, où les Africains affluent pour recevoir l'enseignement de ses érudits.


Le Maroc entretient depuis des décennies un intérêt pour les Zaouïas et les confréries soufies, qui sont en convergence avec les orientations du pays. Rabat voit dans les Zaouïas soufies des foyers d'épanouissement pour des milliers de ses citoyens.


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