L'avenir incertain de la lecture humaine dans le livre audio

17:0818/04/2025, vendredi
AFP
Des livres audio sur les étagères le jour de l'ouverture de la Foire du livre de Francfort 2019 à Francfort-sur-le-Main, en Allemagne.
Crédit Photo : Daniel ROLAND / AFP (Archive)
Des livres audio sur les étagères le jour de l'ouverture de la Foire du livre de Francfort 2019 à Francfort-sur-le-Main, en Allemagne.

Faire lire intégralement un livre en vue de sa version audio coûte cher — trop cher pour certains acteurs du secteur.

Résultat: de plus en plus de maisons d’édition et de plateformes investissent dans le clonage vocal ou les voix de synthèse, un phénomène largement mis en lumière lors du Festival du livre de Paris.


D’anciens chefs d’État se sont prêtés à l’exercice : Nicolas Sarkozy a enregistré plus de 13 heures de ses mémoires
"Le Temps des tempêtes"
en 2021. Barack Obama a fait mieux avec
"Une terre promise"
: 29 heures de lecture en 2020. D'autres œuvres sont lues par des comédiens professionnels. En France, Denis Podalydès a prêté sa voix à Martin Eden de Jack London, et Lola Naymark a incarné la narratrice de Houris, prix Goncourt 2024.

Mais ces productions de qualité, souvent coûteuses, voient leur avenir menacé par l’essor de l’IA dans l’édition sonore. Le Festival du livre de Paris, du 11 au 13 avril, a révélé deux annonces majeures à ce sujet.

Clonage vocal et synthèse : une solution économique


Le leader français de l’auto-édition, Librinova, a annoncé l’adoption de la technologie de clonage vocal, qu’il juge
"largement supérieure aux voix synthétiques, souvent trop robotiques"
. L’IA n’a besoin que d’un court extrait lu par l’auteur pour générer le reste du livre.

De son côté, Spotify a révélé investir 1 million d’euros dans le développement de livres audio narrés par des voix de synthèse, pour pallier le coût élevé des productions humaines et le retard du catalogue en langue française.

La plateforme suédoise s’engage à informer ses utilisateurs sur l’origine de la voix, laissant le choix entre voix artificielle ou voix humaine. Elle continue cependant de soutenir les productions humaines, notamment en cofinançant certains projets avec les éditeurs.


Des éditeurs misent encore sur l’humain


Pour Arthur de Saint-Vincent, directeur général de Hugo Publishing, éditeur numéro un de la romance en France, la voix humaine reste essentielle :
"Il faut de tout"
. L’éditeur, en partenariat avec Glénat, prévoit 200 nouveaux titres audio sans recours à l’IA.

"Nous voulons choisir les voix, travailler avec des comédiens, être intransigeants sur la qualité",
précise-t-il.

L’IA progresse mais reste limitée


Tout le monde ne peut pas se permettre une telle exigence de production. En 2021, Audible, filiale d’Amazon et leader mondial du livre audio, affirmait privilégier la voix humaine. Quatre ans plus tard, une recherche de
"virtual voice"
sur son catalogue anglais révèle plus de 50.000 titres, souvent signés d’auteurs peu connus.

Les retours sont partagés. Certains saluent les progrès techniques rapides. D’autres pointent un manque d’émotion et de variation dans la narration.
"Je ne pense pas que la narration par IA soit bonne avec les émotions des personnages"
, écrit l’autrice Alisanya sur X.

Si les voix artificielles sont de plus en plus justes sur les noms propres et les modulations internes, elles peinent encore à varier le rythme, transmettre l’émotion, exprimer la colère ou la tristesse.

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