"L’"America First" inquiète Israël…"

10:2314/12/2025, Pazar
Abdullah Muradoğlu

La stratégie de sécurité nationale (NSS) de l’administration Trump a été publiée ; le prochain document attendu est désormais la Stratégie de défense nationale (NDS), préparée par le "Département de la Guerre". Les orientations figurant dans la Stratégie de sécurité nationale donnaient déjà, dans une certaine mesure, des indices sur la future Stratégie de défense nationale. En effet, les institutions chargées de la sécurité et de la défense nationales doivent être en parfaite cohérence dans la mise

La stratégie de sécurité nationale (NSS) de l’administration Trump a été publiée ; le prochain document attendu est désormais la Stratégie de défense nationale (NDS), préparée par le "Département de la Guerre". Les orientations figurant dans la Stratégie de sécurité nationale donnaient déjà, dans une certaine mesure, des indices sur la future Stratégie de défense nationale. En effet, les institutions chargées de la sécurité et de la défense nationales doivent être en parfaite cohérence dans la mise en œuvre d’une même stratégie. La Stratégie de sécurité nationale exprime une vision des menaces, des priorités et de l’orientation stratégique du pays. Ces orientations sont ensuite traduites, dans la Stratégie de défense nationale, en plans militaires, structures de forces et choix budgétaires.


La préparation de la Stratégie de défense nationale relève, au sein du Département de la Guerre, du vice-ministre chargé des politiques, Elbridge Colby. Colby avait déjà été l’architecte de la Stratégie de défense nationale lors du premier mandat de Trump. Depuis longtemps, il défend l’idée que la puissance militaire globale des États-Unis doit être redéployée de l’Europe et du Moyen-Orient vers l’Asie-Pacifique.


Colby estime que le soutien apporté par les États-Unis à l’Ukraine, ainsi que l’intensification des interventions au Moyen-Orient, affaiblissent les efforts visant à dissuader la Chine. Il est bien connu que cette approche dérange profondément les néoconservateurs, le lobby pro-israélien, les faucons libéraux mondialistes ainsi que les faucons républicains.


La nomination de Colby par le président Donald Trump au poste de vice-ministre chargé des politiques avait suscité de vives réactions dans les médias pro-israéliens. Tandis qu’une campagne était menée contre lui, de nombreux faucons, dont l’ancien chef de file des républicains au Sénat Mitch McConnell, ont tenté de compliquer son processus de confirmation. Le sénateur McConnell et d’autres faucons soutenaient que la stratégie de défense centrée sur l’Asie-Pacifique affaiblirait les alliances cruciales des États-Unis dans d’autres régions du monde.


Avec l’intervention du vice-président JD Vance, la confirmation de Colby au Sénat a finalement été obtenue de justesse. Le sénateur McConnell, pour sa part, n’a pas changé d’attitude : il a été le seul républicain à voter contre la nomination de Colby. Dans un message publié sur son compte X, le vice-président Vance a violemment critiqué le sénateur Mitch.


Cela étant, les faucons républicains qui contrôlent la Commission des forces armées du Sénat continuent de bloquer les procédures de confirmation de certains hauts responsables réputés très proches de Colby. Par ailleurs, les faucons républicains au sein de la Commission, au premier rang desquels le sénateur Tom Cotton, n’ont jamais cessé de critiquer Colby. Ils l’accusent de ne pas avoir suffisamment consulté leur camp lors de l’élaboration de la Stratégie de défense nationale. Les tensions entre Colby et les républicains faucons ne semblent toujours pas résolues.


À Washington, comme toujours, les clivages politiques portent principalement sur la politique étrangère. Le discours "America First" de Trump, qui prône un désengagement des engagements globaux des États-Unis et, comme le souligne la Stratégie de sécurité nationale, une focalisation sur l’hémisphère occidental dans le cadre d’une "nouvelle doctrine Monroe", au détriment de l’Europe et du Moyen-Orient, fait bondir les faucons. C’est pourquoi, outre la Stratégie de défense nationale, les documents relatifs à l’"évaluation de la posture globale" et au concept de défense aérienne et antimissile sont attendus avec une grande attention.


Les changements qui pourraient être apportés à l’alignement des structures de forces militaires dans l’"évaluation de la posture globale" des États-Unis sont de nature à affecter Israël. Une concentration accrue de la puissance militaire américaine sur l’hémisphère occidental et, dans une certaine mesure, sur l’Asie-Pacifique, soulève la question d’un possible relégage au second plan du Commandement central (CENTCOM), responsable du "Grand Moyen-Orient". Or, un affaiblissement du rôle du CENTCOM ne serait certainement pas une bonne nouvelle pour Israël.


Au sein de l’establishment de la politique étrangère américaine, les avis divergent quant au degré de cohérence entre les stratégies de sécurité nationale et de défense nationale, documents rendus obligatoires par le Congrès. Toutefois, le long discours prononcé par le secrétaire à la Défense Pete Hegseth le 6 décembre lors du "Reagan National Defense Forum", ainsi que les déclarations publiées par Elbridge Colby deux jours plus tard sur son compte X, ont clairement indiqué qu’aucune contradiction ne serait tolérée entre ces deux documents et que l’approche de politique étrangère "America First" de Trump y serait dominante.


Par ailleurs, les différends et les réticences exprimés au sein des deux chambres du Congrès à propos des orientations politiques contenues dans ces documents stratégiques laissent entrevoir les difficultés potentielles auxquelles Trump pourrait être confronté dans la mise en œuvre de ses stratégies de sécurité nationale et de défense nationale.

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