Nouvelle-Calédonie: après les émeutes, Paris relance un dialogue sur l'avenir institutionnel

17:385/02/2025, mercredi
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Le processus politique calédonien est à l'arrêt depuis plus de six mois, après les émeutes déclenchées par la réforme du corps électoral voulue par l'État.
Crédit Photo : LUDOVIC MARIN / AFP
Le processus politique calédonien est à l'arrêt depuis plus de six mois, après les émeutes déclenchées par la réforme du corps électoral voulue par l'État.

Les discussions sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie ont débuté mardi 4 février à Paris, réunissant les représentants des différentes forces politiques du territoire autour du ministre des Outre-mer, Manuel Valls. L'enjeu est majeur: sortir de l'impasse politique dans laquelle l'archipel est plongé depuis l'échec du dernier référendum d'autodétermination en 2021 et les émeutes meurtrières de mai 2024.

Par voie d'un communiqué, le ministère des Outre-mer a indiqué que cette
"nouvelle séquence"
vise à rétablir un dialogue
"sincère et apaisé"
entre indépendantistes et loyalistes, dans le cadre de la sortie de l'accord de Nouméa signé en 1998. Toutefois, le chantier s'annonce périlleux tant les fractures sont profondes.

Le processus politique calédonien est à l'arrêt depuis plus de six mois, après les émeutes déclenchées par la réforme du corps électoral voulue par l'État.

Ces violences ont fait 14 morts et causé plus de deux milliards d'euros de dégâts, aggravant une crise politique et économique déjà prégnante. Manuel Valls, ancien Premier ministre, tente aujourd'hui de reprendre les rênes en prônant une approche basée sur la
"discrétion"
et le pragmatisme.

Des divergences irréconciliables


Six délégations calédoniennes, représentant l'ensemble des forces politiques siégeant au Congrès de Nouvelle-Calédonie, participent aux discussions, qui doivent se poursuivre jusqu'au 15 février.


Mais le dialogue s'annonce difficile: le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), principale coalition indépendantiste, réclame un accord menant à l'indépendance d'ici septembre 2025, tandis que les loyalistes exigent le respect des trois référendums ayant confirmé le maintien de l'archipel dans la République française.

Les indépendantistes arrivent affaiblis et divisés. Le FLNKS a récemment élu à sa tête Christian Tein, actuellement incarcéré en métropole pour son rôle présumé dans les émeutes de 2024. Cette nomination est perçue comme une provocation par les loyalistes, qui y voient la preuve que le camp indépendantiste refuse tout compromis.


L'ombre de l'accord de Nouméa et la crise électorale


Au cœur des discussions, l'accord de Nouméa, signé en 1998, reste un point de tension. Ce texte de décolonisation a permis un large transfert de compétences à la Nouvelle-Calédonie, mais n'a pas permis de trancher définitivement la question de l'indépendance.


Les loyalistes, qui estiment que cet accord n'a pas réussi à
"construire un peuple calédonien",
souhaitent une refonte du modèle institutionnel. À l'inverse, les indépendantistes considèrent que ce processus doit aboutir à la souveraineté du territoire, sous forme d'un État associé à la France.

L'autre enjeu majeur est le report des élections provinciales, initialement prévues en mai 2024. Ce scrutin est crucial car il façonne les rapports de force au sein du gouvernement local et du Congrès de Nouvelle-Calédonie. Mais le gel du corps électoral, mis en place en 1998 pour préserver l'équilibre entre les différentes communautés, est contesté par les loyalistes, qui réclament son élargissement. Cette revendication a conduit aux violences de 2024 et reste une ligne rouge pour les indépendantistes.


Une économie exsangue et un territoire en quête de stabilité


Au-delà des questions politiques, la Nouvelle-Calédonie fait face à une crise économique majeure. Les émeutes de 2024 ont ravagé le tissu commercial et industriel du territoire, et la reconstruction nécessitera plusieurs milliards d'euros.


L'État a conditionné son aide financière à des réformes fiscales et institutionnelles, mais celles-ci restent en suspens tant que le statu quo politique perdure.

Manuel Valls et le gouvernement jouent une carte délicate : relancer un processus institutionnel sans raviver les braises d'un conflit qui, après plus de trente ans d'accords successifs, menace de redevenir une poudrière.


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