Soudan: le terrifiant récit d'une attaque contre un camp frappé par la famine

12:0418/02/2025, Salı
AFP
Des Soudanais déplacés, qui ont fui le camp de Zamzam, se rassemblent près de la ville de Tawila, dans le nord du Darfour, le 14 février 2025.
Crédit Photo : AFP /
Des Soudanais déplacés, qui ont fui le camp de Zamzam, se rassemblent près de la ville de Tawila, dans le nord du Darfour, le 14 février 2025.

Sarah a survécu à la famine, aux guerres et aux déplacements forcés dans le camp de Zamzam, au Darfour, sans jamais envisager de fuir.

Mais la semaine dernière, une attaque des paramilitaires a transformé ce refuge en
"champ de la mort".

Mardi dernier, les Forces de soutien rapide (FSR), en guerre contre l’armée depuis près de deux ans, ont pris d’assaut le camp de Zamzam, bombardant les habitations et incendiant le principal marché, selon des témoins.

"Les bombes tombaient sur les maisons, il y avait des corps dans la rue, c'était impossible de rester"
, témoigne Sarah, qui a marché trois jours avec sa famille pour rejoindre Tawila, à 60 km de là.

Exode sous les balles


Le camp de Zamzam, le plus grand du Darfour avec 500.000 à un million de déplacés, a été le premier lieu au Soudan où l’état de famine a été déclaré en août dernier. Depuis avril 2023, il a accueilli des vagues de réfugiés fuyant la guerre entre l’armée et les FSR.

Mais la semaine dernière, le camp est devenu un cimetière à ciel ouvert. Les FSR assiègent el-Facher, capitale du Darfour-Nord, depuis mai 2024 et intensifient leurs attaques, forçant des milliers de civils à fuir.


"Les rues sont devenues des champs de morts pleins de sang et de cadavres (...). Les incendies ont englouti des maisons et les cris se mêlaient au bruit des balles",
a dénoncé la Coordination des camps de déplacés et réfugiés du Darfour.

Le gouverneur du Darfour, Mini Minawi, a fait état d’au moins 19 morts, tandis que l’ONU a confirmé la mort de deux travailleurs humanitaires.

Des réfugiés livrés à eux-mêmes


L’hôpital de campagne de Zamzam, géré par Médecins sans frontières, est débordé. Faute de bloc opératoire, les blessés ne peuvent pas être soignés.


"Nous avons dû laisser des blessés sur le sol"
, témoigne Adam Issa, qui a fui sa maison en flammes.

En route vers Tawila, les civils ont été pillés aux barrages tenus par les FSR.

"À cinq barrages, ils nous ont fouillées, nous accusant d’être du côté de l’armée (...). Ils ont pris nos portables, notre argent, nos couvertures. Nous n’avons plus rien"
, raconte Maqboula Mohamed, 37 ans.

Les paramilitaires ont menacé les survivants:


Même si vous allez à Zamzam ou el-Facher, nous vous poursuivrons.

"Silence complice" face au génocide


Dans un communiqué, les FSR ont justifié leur attaque en affirmant que le camp avait été
"transformé en base militaire"
par des groupes alliés à l’armée.

Les États-Unis accusent les FSR de génocide au Darfour. Depuis le début du conflit, l’OMS estime qu’au moins 20.000 personnes ont été tuées, mais certaines sources avancent le chiffre de 150.000 victimes.

L’UNICEF alerte sur les conséquences de la violence:
"des centaines de milliers d’enfants sont en danger".

L’administration civile de Zamzam parle d’un
"génocide avéré"
et appelle à une intervention internationale immédiate. Amnesty International réclame "une pression internationale et un embargo sur les armes" pour stopper les massacres.

À Tawila, l’Armée de libération du Soudan, groupe armé neutre dirigé par Abdoulwahid al-Nour, s’engage à protéger les civils. Mais pour Sarah et sa famille, livrées au désert sans nourriture ni abri, l’angoisse demeure.

"Nous nous sommes enfuis avec juste les vêtements sur le dos. Nous n’avons rien, pas même une couverture."

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